Douguine et la quatrième théorie politique

Douguine et la quatrième théorie politique

Le monde que, petit à petit, insidieusement, nos penseurs et dirigeants nous préparent sera un monde uniforme, dominé par une pensée matérialiste, athée et individualiste.

Ce sera un monde où une seule grande puissance, un Empire, exercera son hégémonie dans tous les secteurs : politique avec sa démocratie et le suffrage universel, économique avec sa conception libérale des échanges, mondialiste dans sa dimension, un Empire qui, à l'instar des colonialistes de jadis, imposera ses concepts mentaux sous des vocables engageants mais trompeurs, « droits de l'homme », « démocratie », « égalité des sexes et des genres » etc...

Cette uni- polarité se veut basée sur des valeurs « modernes », soit le consumérisme, l'individualisme, le capitalisme qui toutes rompant avec les traditions nationales sont génératrices des cataclysmes passés (les deux guerres mondiales) et futurs. René Guénon, à l'instar des hindouïstes parle du « Kali Yuga » (âge de fer) pour définir notre époque.

Ces prétextes fallacieux (droits de l'homme, démocratie, mondialisme) cachent en fait l’expansionnisme d'une puissance au détriment de la souveraineté de toutes les autres.

Alexandre Douguine, à propos de la mondialisation, parle de Grande Parodie et du royaume de l'Antéchrist, dont les États-Unis sont l'orchestrateur et le chef dirigeant une guerre idéologique contre la multiplicité des cultures et des traditions qui s'opposent à son impérialisme. Cette opposition prend des formes diverses ; depuis la culture « Disney », le cinéma d' Hollywood et les séries télévisuelles , jusqu'à l'agression brutale (toujours maquillée en intervention humanitaire) de pays résistants à son expansionnisme.
L 'Irak, l'Afghanistan, la Libye, en sont la preuve douloureuse.

Douguine en appelle donc à tous ceux qui, d'une manière ou d'une autre, veulent s'opposer à cette aliénation rampante qui, aujourd'hui, ne cache même plus son jeu et nous impose ses vues, ses objectifs et ses moyens d'une manière de plus en plus brutale et contraignante.

Les forces qui luttent contre l'occident, les États-Unis, la démocratie libérale, la modernité et la post-modernité doivent s'unir. Il n'y a, dans ce contexte, plus de juifs, de chrétiens, de musulmans de bouddhistes, ni de gauche, ni de droite etc.. il n'y a que des hommes qui se battent pour préserver leur identité, leurs traditions, leur religion.

Comment les unir tout en respectant leurs différences, voilà le défi qu'Alexandre Douguine a relevé ?

 

 

La Quatrième Théorie Politique ?

 

C'est un concept qui englobe le refus des théories libérales, démocratiques, capitalistes, globalistes et (post) modernistes. Pour Douguine les théories anti-libérales de jadis (fascisme et socialisme) ne font plus le poids. Il faut, dès lors, retenir de ces dernières leurs côtés positifs, l'anti-libéralisme et l'anti-capitalime certes, mais aussi la justice, la solidarité sociale, et rejeter le matérialisme athée, moraliste et individualiste.

De même, rejet de tout racisme, xénophobie et chauvinisme national. Il n'y a pas de supériorité d'une race sur une autre. Les ethnies, les races sont différentes et s'expriment d'une manière qui l'est autant. L'humanité est pareille à un orchestre symphonique avec des cordes, des bois, des percussions, des cuivres etc... qui tous, depuis leurs pupitres concourent à l'harmonie de l'ensemble.

Mais pas question que d'aucuns imposent leurs structures mentales à d'autres. Il n'y a pas de « valeurs universelles », même des concept allant de soi comme la liberté et l'équité se doivent d'être saisis dans le cadre ethnique et religieux qui leur est propre.

Douguine nomme cette voie : national-bolchevisme, soit un socialisme non matérialiste, exempt d'athéisme, de progressisme et de modernisme, sans le racisme et le nationalisme du fascisme. 

A cela, il ajoute la Tradition pré-moderne, la hiérarchie naturelle, la vision théologique du système social et politique normatif (qu'il soit chrétien, musulman, bouddhiste, juif ou hindou, peu importe).

C'est la République de Platon, ni plus ni moins !

C'est cette source pré-moderne qu'il appelle Quatrième Théorie Politique. Une voie qui n'est pas celle des socialismes matérialistes, des fascismes racialistes et des libéraux capitalistes. Une voie qui transcende la Gauche et la Droite, les préjugés communistes et fascistes et qui englobe les mouvements religieux et anti-modernes (comme les écologistes). Ce dépassement de préjugés cultivés par les tenants du libéralisme de l'élite mondialiste refusera toute confrontation entre juifs et musulmans, chrétiens et hindous etc... Toutes ces exacerbations religieuses et ethniques travaillent pour les forces libérales qui profitent de ces divisions et sapent les traditions propres à chaque groupe pour les remplacer par la religion libérale du progrès matériel.

Justice sociale, souveraineté nationale, valeurs traditionnelles sont les trois principes de cette idéologie.

Douguine nomme « sujet, ou « acteur » de cette Quatrième Théorie Politique , le « Da Sein » dans le sens le plus heideggerien du terme. Il y avait la classe (ouvrière, capitaliste …) du communisme, la « race » ou la « nation » du fascisme, pour les religions c'est la « cité de Dieu » d'un St Augustin, soit la communauté des Croyants, comme la « oumma » de l'islam. La Théorie de Douguine se propose de négocier avec cette diversité par le « Da Sein ». Sur le plan ontologique, le « Da Sein » (être-là, ou plutôt être-le-là) consacre l'existence de l'étant jailli de l'Etre dans toute son intégrité . L'être qui donne naissance à l'être-le-là n'est subordonné à aucune influence extérieure pour la bonne et simple raison que l'Etre est le Tout. Il n'y a pas d'être religieux, philosophique, social, économique, politique, mais simplement l'Etre.

Chaque culture, chaque nationalité est son « être-le-là », toutes sont issues de l'Etre (a-spatial, intemporel), toutes ces cultures peuvent avoir en commun leur conception propre de la justice sociale, la souveraineté nationale et la spiritualité traditionnelle.

Douguine en appelle aussi au « νους » de Plotin, soit l'intellect, cette inclinaison qui fait que tout est Un et multiple à la fois, uniforme et divers, mélangés mais homogène. Nous soulignerons que Douguine aurait pu, en bon chrétien orthodoxe, ajouter le « Logos » (Parole) vivifiant opposé à la lettre stérilisante.